

LE DEVISE
Une pièce de François Bégaudeau
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À partir de 14 ans
Destinée à se jouer dans les classes
Durée : 1H / Débat : 1H
Mise en scène : Manuel Diaz
Jeu : Sara Charrier et Nicolas Luboz
D'aussi loin que je me souvienne j'ai toujours vu cette devise :
« Liberté, Egalité, Fraternité », placardée sur le devant des mairies et des bâtiments officiels. Elle venait rejoindre le folklore républicain avec Marianne, le drapeau tricolore et la Marseillaise. Que sont devenus avec le temps ces symboles ? Que signifie aujourd'hui cette devise pour les jeunes générations ? Comment lui redonner du sens en l'éloignant des discours populistes ? Il nous est apparu intéressant de revenir à sa source et de passer ces trois mots à la loupe. Qu'est-ce que la Liberté ? Est-ce que c'est faire ce que l'on veut ? L'Égalité existe-t-elle vraiment dans une société ? Comment la définir ? La Fraternité nous fédère-t-elle ? Son étymologie masculine n'est-elle pas excluante ? Devrait-on parler d'adelphité ? Tant de questions auxquelles Bégaudeau semble prendre le soin de ne pas répondre pour laisser chacun·e libre et responsable de ses propres interprétations.
Nous vivons aujourd'hui une crise civique majeure. La montée des populismes, la radicalisation, les attentats, un climat social tendu sont autant de symptômes qui nous alertent sur l'état de santé de notre société. Face à ces dangers latents, la réponse politique paraît floue et souvent inadaptée. Le néo-libéralisme s'approprie le langage et s'immisce dans l'inconscient collectif comme seule alternative. La nation semble devenir un concept marketing comme un autre. Relayés par des médias qui traitent l'information en continue sans véritable analyse de fond, les discours se crispent et les esprits s'agitent, favorisant ainsi les discriminations raciales et sociales. Comment redéfinir le contrat moral sur lequel s'appuie notre République ? C'est ainsi qu'est né chez nous le désir de nous tourner vers les nouvelles générations et de questionner avec elles ses fondements.
L'omniprésence des réseaux sociaux favorise les affects et accélère notre rapport au temps. Notre perception du monde et des évènements s'en trouve altérée. Face à toute cette agitation, l'espace de la représentation nous apparaît comme un refuge. En proposant son propre rythme, plus palpable, plus vivant, le théâtre nous invite à construire une pensée. Nous avons cherché un texte contemporain qui pourrait relayer nos aspirations à parler de politique avec les jeunes générations. La Devise de François Bégaudeau s'est révélée comme un outil idéal pour confronter les discours et entamer une recherche autour des symboles qui s'érigent en mythes fondateurs de notre « pacte républicain ». Liberté, Egalité, Fraternité. Programme ambitieux, qui semble lumineux dans son énoncé mais qui une fois regardé au microscope présente des porosités riches de contradictions. Nous avons été séduit·e·s par cette forme légère que nous pourrions faire voyager directement dans les classes de collèges et lycées. Quitter l'enceinte du théâtre et aller à la rencontre des élèves dans leur quotidien. Faire un pas amusé vers eux·elles pour tenter ensemble de développer une réflexion ouverte.
Car pour finir, le texte de Bégaudeau reste inéluctablement ouvert. Pour que chacun·e y puisse lire son rêve démocratique. Rêve qui nous apparaît ô combien plus concret et plus sain que nombre de discours forcés et autoritaires qui tendent souvent à l'hystérie et à la crispation identitaire. Une belle déclaration d'amour à l'intelligence, à la liberté de penser et aux courants divers et multiples qui habitent nos cœurs.